La ville à l’heure du changement.
La ville relationnelle : un livre pour susciter le désir d’autres modes de ville

Sonia Lavadinho, Pascal Lebrun-Cordier et Yves Winkin sont tous trois spécialistes de la ville : la première en tant qu’anthropologue, géographe et fondatrice du cabinet de prospective Bfluid, le 2e en tant que directeur artistique de la ZAT à Montpellier, le 3e en tant que chercheur. Ensemble, ils signent un ouvrage que tout élu ou aménageur devrait lire : La ville relationnelle.

Parce qu’elle concentre commerces, bureaux, administrations, espaces publics et habitat, la ville est par excellence le lieu de la rencontre, de la « force des liens faibles ». Pourtant, cette « ville relationnelle » est très largement sous-estimée par les décideurs politiques. C’est en tout cas ce que notent Sonia Lavadinho, Pascal Lebrun-Cordier et Yves Winkin dans un ouvrage du même nom aux éditions Apogée (2024). « Aujourd’hui encore, les villes consacrent l’essentiel de leurs ressources financières et humaines à se maintenir en fonctionnement aussi régulier que possible », posent dès l’introduction ces trois spécialistes de l’urbain. Quant à cette ville des liens, elle « reste encore trop souvent dans l’angle mort des politiques publiques. » 

Cette négligence se marque spatialement : « la ville relationnelle représente à peine 10 à 20% des mètres carrés qui composent les villes européennes, tandis que la ville fonctionnelle en accapare encore les 80 à 90% restants. » Il faut dire que la ville des liens semble fonctionner d’elle-même, contrairement à la gestion des flux ou l’entretien des réseaux, bref à tout ce métabolisme urbain complexe qu’il faut administrer. Son "aménagement" requiert aussi des approches différentes, qui empruntent à l’urbanisme tactique, au design thinking ou à l’art dans l’espace public. Enfin, elle suppose une bonne dose d’expérimentation - une approche peu compatible avec la planification urbaine.

« La ville relationnelle représente à peine 10 à 20% des mètres carrés qui composent les villes européennes, tandis que la ville fonctionnelle en accapare encore les 80 à 90% restants. »

La ville relationnelle a été écrit tout exprès pour inciter le monde de la fabrique urbaine à mieux saisir l’enjeu et le décliner dans les politiques publiques. Même si l’ouvrage est riche en chiffres et en exemples, il se veut moins un état des lieux qu’un programme à mettre en œuvre. Il s’adresse d’ailleurs explicitement à un public opérationnel - élus surtout, mais aussi aménageurs ou promoteurs. Pour mieux les convaincre, Sonia Lavadinho, Pascal Lebrun-Cordier et Yves Winkin ont opté pour l’écart avec les attendus de tout manuel d’urbanisme. Leur texte est ponctué de récits d’expériences concrètes et quotidiennes de relations, où la part du vrai et de la fiction est bien difficile à démêler. Il est également rythmé par les illustrations de Lisa Subileau, qui offrent autant d’instantanés de la ville relationnelle. 

7 figures inspirantes    

Cette approche originale permet de « donner corps » au programme décliné dans l’ouvrage en 7 figures. Les voici présentées succinctement : 

  1. La ville de la rencontre : c’est la ville des places et des parcs, de tous les lieux publics où l’on peut se poser le temps d’une halte ou d’un rendez-vous, où l’on peut alterner “aloning” et “togethering”. Elle réclame beaucoup de “mètres carrés relationnels”, mais surtout, elle invite à ralentir : la vitesse et le bruit des véhicules à moteur ne font pas bon ménage avec elle.
  2. La ville du dehors : c’est la ville des trames vertes et bleues, où l’on se connecte au vivant par tous les sens, où l’on engage son corps en se déplaçant à pied où à vélo, au contact direct de l’air et de l’environnement.
      
  3. La ville amie de toutes les générations : elle place les enfants, les familles ou les personnes âgées au coeur de la conception urbaine et rompt avec une approche zonée qui leur ménage des espaces dédiés, sortes de « réserves d’Indiens ».
  4. La ville du faire et du tiers solidaire : c’est la ville de la jachère, qui ménage des espaces d’expérimentation collective dans les friches et accepte une certaine part d’informel, de spontanéité et de « laisser-faire » dans l’espace public.
  5. La ville de la surprise : elle accueille un foisonnement d’interventions artistiques pour susciter l’étonnement et enrichir les imaginaires urbains.
  6. La ville comestible : elle assume son rôle productif et invite les citadins à mettre les mains dans la terre, seuls ou ensemble, pour explorer de nouvelles formes de relations avec le monde végétal et/ou partager un repas.
  7. La ville du temps libre : elle est celle « qui envisage toutes les relations entre les espaces publics et les temporalités de la vie ordinaire. » Elle prend en compte la diversité des rythmes urbains et des usages de la ville. Attentive à ce qui se fait en dehors du temps de travail, elle s’intéresse tout particulièrement à la nuit - espace-temps de la fête, mais aussi du repos et de la contemplation des étoiles. 

L’urgence d’une « transition relationnelle »

Bien sûr, ces diverses modalités de la ville relationnelle sont non-exclusives et poreuses. « Il ne s’agit pas de dire que les 7 figures doivent être mises en oeuvre simultanément au cours d’une seule et même mandature, peut-on lire dans l’ouvrage. Les collectivités peuvent plus raisonnablement se donner pour objectif de réussir à matérialiser de façon incrémentale deux à trois de ces figures de ville par mandature. »

D’après Sonia Lavadinho, Pascal Lebrun-Cordier et Yves Winkin, il est en tous cas urgent d’accélérer la « transition comportementale. » Selon eux, celle-ci se conjugue en effet à d’autres transitions et peut en déterminer le succès. « La décarbonation ne pourra se faire que dans une ville devenue relationnelle, expliquent-ils, une ville où primeront les dynamiques de proximité, les sociabilités - fortes ou faibles - et une relation au vivant qui sera tout autre que celle que nous connaissons aujourd’hui. » 

D’ailleurs, l’enjeu est tel pour les auteurs du livre qu’ils ont conçu La ville relationnelle comme une entrée en matière, un genre de préambule. L’ouvrage est le premier opus d’une collection de quatre livres qui exploreront divers versants des interactions urbaines et décriront les leviers et dispositifs susceptibles de les favoriser. À suivre, donc. 

À lire : 

La Ville relationnelle, les sept figures, de Sonia Lavadinho, Pascal Lebrun-Cordier et Yves Winkin, Paris, éditions Apogée, 2024. 200 pages, 15 euros. 

2025-04-30
Le kit, une réponse d'archi légère et écologique

A l'heure où la pression foncière engendre une envolée des prix du logement et une nécessité de composer avec la densité du bâti urbain, quelques architectes et urbanistes travaillent sur des projets d'habitat « léger » dont l'ambition n'est autre que de mixer innovation et petit prix.

Légère par les matériaux utilisés et par son empreinte environnementale, la maison en kit s'affiche comme un laboratoire de recherche et comme une alternative à la maison dite de « maçon ».

Simple à assembler, modulable et moins chère qu’une maison de maçon, la maison en kit a le vent en poupe. Définie par Claude Vergnot-Kriegel,Carine Merlino et Étienne Delprat, auteurs d’un ouvrage sur le sujet (Éditions alternatives, 2011), comme « une habitation érigée rapidement, avec un nombre limité d’éléments préfabriqués », elle bénéficie en effet d’un contexte où se conjuguent crise du logement et flambée des coûts de construction.

Avant même le relatif succès commercial de la maison en kit dessinée par Starck en 1994 pour le catalogue des 3 Suisses, le kit avait trouvé des formulations diverses dans l’architecture du 20e siècle. Comme l’expliquent les auteurs de « Maisons en kit » , « les architectes des premières maisons en kit sont ceux du mouvement moderne. Si Frank Lloyd Wright, Le Corbusier, Prouvé, les Smithson, les Eames, ont œuvré pour développer des habitats préfabriqués, c’est parce qu’ils y voyaient l’opportunité de répondre à la crise du logement. Ils cherchaient absolument à innover et croyaient en un futur différent, ainsi qu’à d’autres modes de vie. » Avec l'arrivée des congés en 1936, les premières maisons en kit se développent en France, apparaissant comme idéales pour une maison de loisirs tout en permettant une plus grande créativité formelle. Qu’il s’agisse de prototypes ou de projets commercialisés, le dénominateur commun à la multitude de déclinaisons du kit est de proposer des réalisations à de petites échelles, offrant une simplicité des assemblages à un coût intéressant. De plus, le kit s'affiche comme une réponse « aux préoccupations actuelles en matière de société et d'environnement. »

Le kit, bon pour l'environnement ?

Premier argument en faveur de la maison en kit : son empreinte écologique, supposée plus légère que celle de l’habitat classique. Ainsi, de nombreux projets contemporains de maisons en kit ont une approche environnementale forte, que ce soit grâce au choix des matériaux ou à l'emploi d'énergies renouvelables. Pour les auteurs de « Maisons en kit », elle est « par nature une maison écologique. Elle permet (...) le stockage de CO2 si elle est en bois, la réduction du transport des matériaux pour sa réalisation, des agrandissements aisés avec un impact minimum sur l’environnement… ».

Le projet « Infiniski manifesto house » au Chili des architectes James&Nau en est un bel exemple. Constituée de 2 containers, la maison est construite à 85 % à partir de matériaux recyclés (cellulose, liège, aluminium…) et dispose d'une autonomie énergétique de 70 %, le tout en réalisant 20% d'économies par rapport à une maison « traditionnelle ». Dans la même veine, le concepteur de l'éco-quartier britannique BedZed , Bill Dunster a élaboré la maison ruralZED, une maison en kit évolutive comprenant de nombreuses options de production énergétique allant jusqu’au zéro carbone.

Au-delà de ses performances environnementales, l’une des principales forces de ce projet, est d'offrir des options personnalisables, de sorte que la maison peut s'adapter à l'architecture vernaculaire et aux différentes réglementations et plans locaux d'urbanisme. Une façon d’écarter l’un des dangers potentiels de la construction en kit : l’uniformisation. En effet, parce qu’elle consiste à assembler des éléments préfabriqués, celle-ci est presque exclusivement orchestrée par de grands groupes industriels qui mettent à mal la créativité purement formelle des projets. A se demander si le kit peut se développer sans pour autant être synonyme de standardisation ?

Dans la mouvance du DIY

Conscient du danger, Ikea a conçu il y a quelques années une maison en kit entièrement personnalisable : Boklok. Développée en concertation avec Skanska, l’un des principaux acteurs du BTP scandinave, celle-ci se positionne comme « la norme à faible coût de la construction résidentielle » et se commercialise en Finlande, Suède, Norvège, Danemark, Allemagne et en Grande-Bretagne. Cette formule de maison clé en main peine à traverser les frontières françaises et le concept DEARS de Philippe Starck, dont le lancement est prévu pour l’automne, semble voué à faire cavalier seul.

Comme le soulignent très justement les auteurs de « Les Maisons en kit », «  puisque la maison en kit comme objet commercialisé est aujourd’hui à la portée exclusive de groupes industriels, il faudra attendre que ces firmes s’intéressent davantage au secteur de la construction de logement préfabriqué. Il faudra probablement assouplir les réglementations commerciales et techniques françaises et européennes, pour permettre à de petites sociétés de commercialiser des kits habitables, enrichissant ainsi l’offre et la possibilité d’autoconstruction totale ou partielle. En attendant, les seules propositions de maisons contemporaines sont celles des industriels ou des équipes de conception-construction, pour des lotissements urbains à grande échelle.» Pour Etienne Delprat, l'auto-construction et la dimension « Do It Yourself » du kit est fondamentale : « c'est une démarche qui permet l'appropriation, explique-t-il. L'autoconstruction est-elle réaliste à l'échelle d'une maison? Oui, dans une certaine mesure. Il y a des projets où avec une vingtaine de personnes tu peux réussir à construire ta maison ».

Mobilité et architecture d'urgence

Mais s’il est encore peu développé dans l’habitat, le kit a su trouver des concrétisations intéressantes en matière d'architecture d'urgence. Exemple : la Paper Log House de Shigeru Ban. A partir de papier recyclé, l'architecte a construit une trentaine d'exemplaires de sa maison de fortune qui a servi d'abri aux sinistrés du séisme de Kobe en 1995. Logique : modulable, transportable, adaptable et pas cher, le kit offre une réponse idéale aux situations d’urgence. C’est pourquoi il pose en filigrane la question de la mobilité, voire de l'immobilité. Si son développement récent semble un effet de notre société « nomade » et vouée à la vitesse, il existe encore peu des maisons en kit mobiles. Pourquoi une telle absence de prise en compte de la mobilité dans les projets actuels ? « Peut-être cela traduit-il un besoin de se ré-ancrer sur un territoire ? », s'interroge Étienne Delprat.

 

En savoir plus

"Maisons en kit". Editions alternatives

2011-07-01
Efficacité énergétique : le rôle de l'Internet des Objets

Notion encore peu connue qui correspond à l'extension d'Internet à des choses et à des lieux dans le monde réel, le concept reste flou et ses applications obscures. Alors, concrètement, qu'est-ce que l'Internet des objets et quelles perspectives ouvre-t-il en termes d'efficacité énergétique ? Permettra-t-il de réduire nos consommations énergétiques de façon significative? A quel horizon? Le point sur ces nouvelles technos.

 

Quelles perspectives ?

« Le concept reste encore confus mais ses promesses sont grandes, [l'Internet des objets] vise à donner une identité au moyen d'une adresse IP à des objets, des équipements ou encore des machines afin de les mettre en réseau et de les faire communiquer entre eux». Voici la définition proposée par Geoffrey Zbinden dans son ouvrage « L'Internet des Objets, une réponse au réchauffement climatique (Éditions du Cygne, 2010). Objets intelligents voire objets « vivants », les objets connectés ou communicants, qu’on annonce aussi comme le web 3.0, trouvent leurs premières applications dans de nombreux champs. Le Lieu du design accueille jusqu'au 23 juillet une exposition intitulée « Objet(s) » du numérique design d’un nouveau mone industriel » présentant quelques prototypes et projets dans le but affiché de mettre en avant  le rôle du design numérique dans des problématiques humaines, sociales, technologiques et économiques.

Parmi ses objets, « Efficient Home » de Mathieu Lehanneur et Attoma design pour Schneider Electric. Soit une gamme d’éléments destinés à optimiser la consommation énergétique du foyer dans l'optique d’en réduire significativement l’empreinte carbone. Selon Geoffrey Zbinden, les compteurs intelligents pourraient permettre de réduite la facture de près de 30% pour les particuliers. Le tout grâce aux informations communiquées en temps réel par ces émetteurs-récepteurs, positionnés sur des appareils électriques tels que la chaudière, le réfrigérateur, la télévision... Les capteurs assurent ainsi une veille permanente de la consommation. Les données sont ensuite consultables via internet. Identifier les appareils les plus gourmands, éviter de les utiliser aux heures pleines sont autant de comportements qui pourraient permettre de réduire la facture électrique d’un logement.

Plus globalement, des interfaces de visualisation et de contrôle (Smart Meters) remplaceront à terme les compteurs électriques traditionnels. Ils seront connectés à une plus vaste échelle par un réseau dit intelligent – c'est ce qu'on appelle le SmartGrid, un réseau de transport de l’électricité optimisé par des systèmes d’informations numériques. Selon le site www.smartgrids.eu, ce système permettrait une réduction de CO2 de 9% dans l’Union Européenne. En France, le compteur intelligent, développé par ERDF (Électricité Réseau Distribution France), s’appelle Linky et près de 300.000 compteurs sont actuellement installés dans deux agglomérations-tests : Lyon et Tours. Pour les utilisateurs, les économies d’énergie promises par ce système devraient être comprises entre 10 et 20%. La validation et la généralisation de ce type d'objets devraient être effectives aux alentours de 2017, à l'issue de l'actuelle phase d'expérimentation.

Les autres champs possibles d'application dans le développement durable

Eau, bâtiments, transports, biodiversité... : dans son ouvrage, Geoffrey Zbinden met en avant les nombreuses applications dans lesquelles l'Internet des Objets apporterait des solutions concrètes à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre et par extension contre le réchauffement climatique. En matière d'agriculture intensive par exemple. Selon l'auteur, un réseau communiquant permettrait de détecter les fuites et d'ajuster l'irrigation en fonction des besoins et de réduire de près de 30% la consommation moyenne en eau des terres cultivées. Le secteur des transports n'est pas en reste. Des économies sont déjà réalisées grâce à la technologie Stop&Start (systèmes d'arrêt et de redémarrage automatique) et le programme d'éco-conduite à l'étude au sein de L'Europe ouvre des perspectives intéressantes. Le but annoncé est de réduire d'au moins 50 millions de tonnes les émissions de CO2. Le principe ? Des capteurs sont installés un peu partout sur le véhicule, enregistrant ainsi les gestes du conducteur, sa manière de conduire, son respect de la limite des vitesses. A l'issue d'une période donnée, l'automobiliste reçoit son bilan et se voit attribuer une note en fonction de sa bonne conduite. Le système permettrait de réduire la consommation d'essence de 15 à 20% en limitant les accélérations brusques.

D'autres expérimentations offrent aussi quelques espoirs. Le projet pilote de Moulins sur Allier mené depuis 2007 en est une démonstration : 80 logements HLM ont été équipés de capteurs communicants et permettent aux habitants de mesurer la consommation d'eau en temps réel via un site web. Ce feed-back modifie significativement les comportements puisqu’elle a permis de diminuer de 20% la consommation d'eau des occupants. Dans la même veine, en 2012, la communauté d'agglomération de Besançon mettra en place une redevance pour inciter les habitants au tri sélectif et à la réduction de leurs déchets. La facturation sera fonction du poids des déchets, mesuré par des puces RFID (“radio frequency identification”) installées sur les bacs. L'objectif à l'horizon 2014 est de réduire les déchets de 17% pour l'habitat pavillonnaire. Le coût d'une telle initiative ? Un investissement de 5 millions d'euros, dont près de la moitié subventionnée par divers organismes (dont l'Ademe), et qui devrait être amorti sur 10 ans. L'autre moitié, financée par emprunt et autofinancement, engendra un surcoût de 4€ par habitant sur l'année 2010/2011 et de 1,5 € par habitant sur les dix prochaines années. On s’en doute : ces investissements conséquents freinent en partie le développement de ce type de technologies.

« Aujourd'hui, sur la question des villes intelligentes, à chaque besoin (éclairage urbain, traitement des déchets, réduction thermique de bâtiments publics) on trouve une application. L'enjeu derrière tout ça, c'est l'interopérabilité de toutes ces applications. De plus, il faut passer du projet pilote à une échelle nationale. Cela ne me semble pas réalisable avant 2020 », précise Geoffrey Zbinden. Malgré des initiatives disparates, des investissements importants et des perspectives encore lointaines, l'Internet des Objets pourrait jouer un rôle dans la réduction des émissions de CO2 et la préservation des ressources rares. Mais les espoirs qu'il suscite ne masquent par tout à fait les inquiétudes qu’il engendre… Dès lors que le web 3.0 généralise la collecte d’informations à toutes les échelles et dans tous les domaines, comment assurer un niveau suffisant de protection des données à caractère personnel et de la vie privée ? La question est cruciale si l’on veut éviter que la préservation de l’environnement ne tourne à la surveillance généralisée, dans un cauchemar à la Big Brother où nos objets quotidiens deviendraient outils de contrôle…

En savoir plus

Geoffrey Zbiden,  "L'Internet des Objets, une réponse au réchauffement climatique" (Éditions du Cygne, 2010)

2011-06-21
Gratte-ciel : toujours plus haut, toujours plus vert ?

Si la crise immobilière mondiale a ralenti de nombreux projets de construction de gratte-ciel, le vent semble de nouveau tourner dans le sens des cabinets d’architectes depuis quelques mois. Mais si ces derniers intègrent aujourd’hui la problématique environnementale dans la construction de leur tour, il est encore difficile de distinguer les projets faussement écolos des véritables buildings verts.

"Ils sont absurdes par ce qu’ils cherchent, ils sont grands par ce qu’ils trouvent" disait Paul Valéry. Aujourd’hui, les cabinets d’architectes mettent en œuvre les idées "absurdes" qu’ils trouvaient il y a quelques années. Ces projets présentés au début des années 2000 alors que l’écologie devenait progressivement une préoccupation internationale sont aujourd’hui passés de l’écran d’ordinateur au chantier de construction. Et chacun intègre désormais une dimension écologique de plus ou moins grande valeur. Peut-on pour autant parler d’architecture durable pour ces tours de plusieurs centaines de mètres de haut ? Difficile de donner une réponse définitive tant le concept même d’architecture durable est compliqué à définir.

Pas d’éco-building sans éoliennes sur le toit

"L’architecture durable, c’est avant tout une qualité d’usage. Il faut respecter le site dans lequel s’inscrit le projet et choisir des matériaux durables" nous expliquait récemment l’architecte Edouard François. Si ces principes peuvent aisément s’appliquer à des structures de taille standard, ils sont plus difficiles à respecter quand l’équilibre visuel d’une ville est cassé par l’apparition d’une tour surdimensionnée. Dans une mégalopole comme New York, de nombreux buildings sont en passe d’être centenaires. Ces superstructures énergétivores sont un fardeau quand il s’agit de les mettre aux normes environnementales actuelles. Le demi-milliard de dollars investi dans l’Empire State Building pour en faire un gratte-ciel un peu plus vert en est la preuve évidente. Dès lors, il faut compter sur les tours actuellement en construction pour éviter de faire de ces buildings de simples phallus se dressant dans le ciel.

En la matière, les projets ne manquent pas et l’actualité architecturale est plutôt chargée ces derniers mois. Hier, l'Etablissement public d'aménagement de la Défense Seine-Arche (Epadesa) a annoncé qu'il approuvait la promesse de vente pour la construction de la tour Phare (300 m, 69 niveaux de bureaux) qui deviendra en 2016 la plus haute de France. Imaginée par l'architecte américain Thom Mayne, celle-ci comportera des éoliennes à son sommet, qui participeront à la fourniture en électricité des bureaux. La façade de la tour sera conçue de manière à assurer une ventilation naturelle, avec à la clé d'importantes économies d'énergie. Problème, aucun chiffre n’est avancé pour le moment quant à l’économie réalisée. La production d’électricité générée par les éoliennes reste également un mystère. La présentation officielle du projet se contente d’évoquer "un jardin métaphorique dans le ciel"…

Les projets les plus aboutis à Dubaï et… en Chine

De nombreux architectes choisissent aujourd’hui de placer des éoliennes sur les tours pour présenter ensuite le projet comme écologiquement responsable. C’est notamment le cas du cabinet JDS Architects, qui a imaginé une tour de 1111 mètres de haut pour la ville chinoise de Shenzhen. Des éoliennes (leur nombre n’est pas précisé) et un système de récupération de l’eau de pluie (idée développée à son paroxysme par des étudiants polonais ici) devant suffire à rendre la structure autonome sur le plan énergétique. Difficile à croire si l’on compare ce projet à la tour Strata à Londres. Là aussi, les architectes ont placé des éoliennes au sommet du bâtiment haut de 148 mètres. Résultat ? Les trois turbines de cinq pâles chacune produisent environ 50 MWh par an. Soit une production qui fournit 8 % seulement de l’énergie consommée par la tour. L’autonomie énergétique est donc loin d’être assurée.

Pourtant, certains gratte-ciel en cours de construction ou déjà érigés méritent amplement le label d’éco-building. Il en existe actuellement une dizaine dans le monde. C’est le cas d’une tour à Dubaï imaginée par l’architecte italien David Fischer et dont nous vous parlions l’année dernière. Contrairement aux projets évoqués précédemment, celle-ci intègre des turbines éoliennes en fibre de carbone dans sa structure. Elles sont en effet installées horizontalement entre les étages et suffisent à produire toute l’énergie dont la tour a besoin. Toujours à Dubaï, La Burj al-Taqa (Tour de l'Énergie) profite d’un nouveau vitrage (60% de chaleur en moins absorbée par le bâtiment), d’ouvertures latérales sur la façade pour une meilleure circulation de l’air et de 15 000 m2 de panneaux solaires disposés sur le toit pour assurer sa production énergétique. La Burj al-Taqa n’aura pas besoin de se raccorder à un réseau électrique extérieur et l’excédent d’énergie produit sera même utilisé afin d'obtenir par électrolyse, de l’hydrogène de l’eau de mer. L’hydrogène, stocké pendant le jour, sera ensuite utilisé pour alimenter le circuit électrique aux heures de nuit.

Enfin en Chine, la Pearl River Tower dominera dès cette année la ville de Guangzhou (Chine). Imaginée par le cabinet d’architecture américain SOM (Skidmore, Owings & Merrill), cette tour haute de 310 mètres est équipée de turbines éoliennes disposées dans les renfoncements de sa structure. Sa façade aérodynamique est orientée en direction des vents dominants et a été conçue pour les accélérer de 50% afin d’améliorer le rendement des éoliennes. La façade du building est recouverte de panneaux photovoltaïques tandis qu’un système innovant de refroidissement assure l’aération et la ventilation des 71 étages de bureaux.  

Le bâtiment vert, pas si cher que ça…

Aujourd’hui, les gratte-ciel entièrement autonomes sur le plan énergétique sont rares mais un élan s’est crée ces dernières années. La plupart des cabinets d’architectes intègrent désormais cette problématique dans leur cahier des charges. Reste à convaincre les professionnels du secteur de la construction. Ces derniers surestiment souvent les coûts liés à la construction de bâtiments respectueux de l’environnement. Ainsi, selon une étude publiée par le Conseil Mondial des Entreprises pour le Développement Durable (WBCSD), les professionnels du bâtiment évaluent à 17 % les coûts supplémentaires d'un bâtiment vert par rapport à une construction classique, soit plus de trois fois le surcoût réel estimé par WBCSD à 5 %. Un travail sur les mentalités reste donc à effectuer pour que les projets rêvés d’éco-buildings deviennent réalité dans quelques années et confirment à nouveau la maxime de Paul Valéry.

2011-06-16
Écrit par
Nicolas Buchoud
Richard Reynolds, green guerillero : « La guerilla gardening permet de voir la ville différemment»

Richard Reynolds a fondé GuerrillaGardening.org en 2004. Né en 1977, diplômé de l’Université d’Oxford (Géographie) et de la Royal Horticultural Society en horticulture, il organise de nombreuses conférences sur le sujet et vit à Londres. Invité dans le cadre du salon Jardins Jardin, Richard Reynolds a accepté de répondre à nos questions et de parler de la guerilla jardinière.

Pourquoi se référer à la guerre et à la guerilla alors que vos actions semblent profondément influencées par un activisme non violent ?

Tout simplement parce que cela reste une bataille, non pas avec les individus mais avec les institutions quand celles-ci tentent de nous arrêter. Je ne suis pourtant pas un radical mais il arrive que nos actions soient considérées comme des détériorations criminelles. Ce ne sont pas nos terres et nous n'avons pas l'autorisation de les exploiter mais il s'agit de parcelles non utilisées donc finalement peu de gens se plaignent. Par contre, quand nous subissons des pressions et des interdictions, nous n'avons pas de poids, notamment financier, pour nous défendre car nous agissons en petits groupes.

Vous dîtes que la « green guerilla » est une lutte pour la liberté d'expression et la cohésion sociale? Pourquoi ?

Il s'agit d'espaces où les gens s'expriment librement, il n'y a pas de règles ni de contraintes, si ce n'est « botaniques ». La seule limite est finalement l'imagination. Quand les gens sont partie prenante de quelque chose, quand ils deviennent acteurs en s'impliquant de manière régulière dans la plantation et l'entretien d'un espace, ils revendiquent cet espace comme étant le leur. C'est l'aspect collectif mais aussi et surtout communautaire qui permet de parler de cohésion sociale.

Le mouvement aurait-il la même ampleur s'il était légal ?

Si le mouvement était légal, tout serait moins drôle, moins excitant. D'un autre côté, si les gens étaient certains de ne courir aucun risque de représailles de la part des autorités, peut-être que davantage de personnes rejoindraient le mouvement. La green guerilla n'est pas une action agressive, même si certains l'envisagent de façon plus radicale, comme le mouvement parisien. De plus, si tout ceci devait mener à une « commercialisation » avec par exemple des bombes de graines ou tout autre type d'objets dérivés, je n'aurais rien contre, même si c'est n'est pas mon ambition. Et peut-être que la commercialisation pourrait permettre de populariser notre action.

Quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confrontés ?

C'est une très bonne question ! Tout d'abord, nous aimerions que les autorités nous encouragent davantage. Lorsque nous organisons des réunions d'information, de conciliation et de négociation, les représentants des pouvoirs publics sont présents mais on reste toujours au stade de la parole. Parfois, nous arrivons à un accord tacite mais où finalement personne ne s'engage à prendre des responsabilités et à proposer quelque chose d'écrit et de définitif. De plus, nous aimerions rendre ce mouvement attractif au plus grand nombre. Il n'y a pas d'âge, de classe sociale ni d'appartenance à un groupe défini pour se sentir impliqué dans la revégétalisation de nos espaces urbains délaissés.

Aujourd'hui, quelle est l'ampleur du mouvement ?

Pour vous donner un chiffre, mon site internet (guerillagardenning.org) reçoit environ 60.000 visiteurs/mois. Certaines personnes pratiquent la « guerilla gardenning » sans le revendiquer, d'autres la pratiquent sans même le savoir. En solitaire, en groupe, tel un divertissement ou dans une démarche revendicatrice ou politique, le mouvement est polymorphe. Toutefois, nous constations que dans de nombreux pays (Europe, Canada, États-Unis, …), les jardiniers sont d'une manière ou d'une autre liés à ce mouvement.

Pensez-vous que la guerilla soit une forme d'art ?

Ce n'est pas le but de notre démarche. Notre mouvance n'a pas vocation à être de l'art mais peut aussi le devenir et dans ce cas, je n'ai rien contre. Je connais des artistes qui pratiquent la guerilla gardenning, certains le font avec authenticité, d'autres avec prétention… Quoi qu'il en soit, ce n'est pas l'aspect que nous voulons mettre en avant mais je reconnais qu'il y a un aspect artistique dans ce que nous faisons.

En savoir plus

Blog de Richard Reynolds : www.guerrillagardening.org

2011-06-09
Les délaissés urbains à la merci des green guérilleros

Parterres d'arbres, pieds de mur, bacs de fleurs vides, friches… Les interstices urbains et les failles du bitume sont autant de lieux à investir pour ces nouveaux jardiniers urbains que sont les « green guérilleros ».

L'origine de cette forme d’action directe non-violente, sinon de cette éco-tactique, remonte aux années 1970. A New York, parallèlement à l’émergence des jardins communautaires dont elle est un des fers de lance, l’artiste Liz Christy inaugure alors la « Green Guerilla » à coup de « seed bombs » (bombes de graines) lancées dans les béances de la ville. Dès les prémices du mouvement, l'ambition est bel et bien de revégétaliser les délaissés urbains de façon à redonner de la vie à un quartier déshérité. Depuis, le mouvement s'est amplifié et des actions de Guerilla gardening ont été rapportées un peu partout dans le monde, surtout à partir des années 2000.

Un activisme soft

Les raisons de pratiquer cet activisme vert sont multiples, comme le souligne Richard Reynolds, l’un de ses chefs de file, dans l’ouvrage La guérilla jardinière : on plante pour reconquérir la ville, favoriser les échanges et les rencontres, se nourrir, sinon par idéalisme... Dès les premières pages du livre de Richard Reynolds, le ton est donné : «  La guérilla jardinière est une lutte pour les ressources, une bataille contre la rareté de la terre, la destruction de l'environnement et le gaspillage des opportunités. C'est aussi un combat pour la liberté d'expression et la cohésion sociale  » (p 15). Un discours qui rappelle la dimension engagée d'un mouvement aux multiples visages, et dont la relation avec les autorités est teintée d’ambivalence (voir interview).

«  C'est une action douce de protestation, explique Reynolds. L'implication et la motivation doivent précéder les autorisations qui peuvent venir après, une fois que les pouvoirs publics peuvent constater les résultats obtenus ». De fait, lorsqu’il s’agit de refleurir la ville, c’est l’approche pragmatique qui prime, avec en arrière-plan ce mot d’ordre : Do-it-yourself ! Proche des valeurs autonomes revendiquées par le DIY, la Guerilla gardening récuse aussi toute forme d’organisation hiérarchique et se déploie plutôt comme un collectif informel et à géométrie variable. Pourtant, qu’ils soient indépendants, isolés ou particulièrement investis dans la communauté, ses différents groupes se structurent progressivement. Depuis 2007, un congrès international des guerilla gardeners est même organisé chaque 1er mai, journée durant laquelle sont plantés des tournesols.

Une nouvelle tendance de la nature en ville

Parallèlement à la structuration du mouvement, ses manières de faire et de penser la ville essaiment un peu partout comme de la mauvaise herbe. Prenez les « bombes de graines », ces boules fabriquées par les green guerilleros à partir d’argile, de compost et de graines de fleurs horticoles ou indigènes. Voici que de jeunes designers commencent à réfléchir à des objets qui en sont directement inspirés. Ainsi, à l'occasion du concours de l’innovation au salon Jardin jardins (27-29 mai) sur les nouveaux usages du végétal en ville, le lauréat du concours Gauthier Leleu (étudiant BTS design produit à ESAAT de Roubaix) a proposé un kit de trois objets destiné à s'initier à la guérilla jardinière. L’intérêt qu’a suscité son travail confirme le côté résolument « tendance » de la Guerilla gardening. Il suggère aussi que cette forme d’activisme vert est un bon point de départ pour qui veut repenser la place du végétal en milieu…

Pour en savoir plus

Richard Reynolds – « La guérilla jardinière », éditions Yves Michel, Paris, 2010

2011-06-09
L'architecture écolo selon Edouard François

Tower Flower, SkinWall, Eden Bio ou l’Immeuble qui pousse : voici quelque projets emblématiques d’Edouard François, architecte et urbaniste.

L’homme s’est fait une place de choix dans le milieu de l’architecture durable jusqu’à se faire appeler le « géant vert ». Une caricature dont Edouard François essaye de s’affranchir en se concentrant sur ce qu’il envisage comme le cœur de son métier : l’inscription dans le contexte architectural, l’humain et les usages. Rencontre.

Qu’il travaille sur une tour dans le quartier Massena, un lotissement de logements sociaux dans le 20e arrondissement de Paris ou sur la façade de l’hôtel Fouquet’s Barrière sur les Champs Elysées, le travail d’Edouard François part toujours du contexte et propose une architecture qui respecte les paysages, quels qu’ils soient. « Je travaille principalement sur des problématiques contextuelles, explique l’architecte. Par exemple, j’ai travaillé sur le projet Eden Bio en même temps que le Fouquet’s et on peut voir deux positions extrêmes. D’un côté, c’est une position sur une façade d’un quartier chic et d’un autre, il s’agit d’une position sur une intériorité, un cadre de vie. Faire du durable pour moi, c’est proposer un projet spécifique à un site donné. On ne peut pas coller la même tour ici et là. » Cette manière d’approcher l’architecture « durable » est un peu la marque de fabrique d’Edouard François, sa signature.

Mûrie peu à peu depuis 1998, année où il crée sa propre agence d’architecture après s’être associé à François Roche de 1990 à 1993 et à Duncan Lewis de 1994 à 1997, elle se pose en préalable à chaque projet, et constitue sa façon d’aborder l’environnement « sans le confondre avec des problématiques techniques qui n’ont pas grand intérêt, que tout le monde sait faire et que tout le monde est obligé de faire. »

Le végétal à bon escient

Autre marotte de l’architecte : l’utilisation du végétal. En témoignent la façade végétale des Gîtes Ruraux, à Jupilles ; l’Immeuble qui pousse à Montpellier, Tower Flower ou l’immeuble aux bambous. Pourtant, à mesure que s’est généralisé l’engouement pour les murs végétaux et autres manières de « verdir » à bon compte un bâtiment, Edouard François est devenu sur ce point plus parcimonieux : « Le vert comme « nature » va devenir emblématique du développement durable et cet emblème commence à être utilisé à tort et à travers. J’ai commencé cette approche de façon contextuelle, je trouvais intéressant d’opposer à un parc une façade végétale car cela apporte du sens. Pour le Fouquet’s, on m’a demandé une façade végétale, j’ai dit non, car cela n’avait pas de raison d’être. Le végétal, c’est une réponse à des problématiques contextuelles mais aussi de densification, de saisonnalité ».

Ainsi, pour ne pas être prisonnier de son étiquette de « géant vert », l’homme qui affirme «  avoir inventé le genre arbre dans l’architecture », essaie de ne pas prendre le végétal pour point de départ de son travail et de le convoquer seulement si nécessaire, comme avec le projet de tour dans le quartier Massena à Paris :

«  Je reviens dans ce projet sur l’idée de végétal, positionné en hauteur, pour donner l’effet d’une touche verte comme un gros arbre ou le Mont Valérien. Cela ne déforme pas la ville »

De nombreux projets de logements sociaux

Construction de 18 logements sociaux HQE à Louviers en Normandie, 30 logements sociaux avec Eden Bio dans le 20e à Paris et actuellement un projet de 114 logements à Champigny sur Seine : l’architecte participe à de nombreux projets en logement social. Condition de sa participation à ce type de projet : «  quand on pose une question un peu pointue sur cette question ». Et Edouard François de citer l’une de ses réalisations, en cours à Champigny : « ce projet se situe dans une zone qu’on appelle « déshéritée ». Mon ambition, c’est de réconcilier cette zone. J’aurai gagné si je réussis à en faire un centre ville». Pour ce défi, l’architecte a eu l’idée de rassembler dans un même bâtiment les trois « vocabulaires » architecturaux du site : maisons de ville, pavillons et barres.

Les projets de logements sociaux lui permettent ainsi une créativité architecturale intéressante. Pour le projet Skin Wall à Grenoble (Construction de 68 logements sociaux locatifs et en accession à la propriété financée par l’Union Européenne), il a préféré mettre l’accent sur les problématiques d’hyper isolation et environnementales pour tendre vers des bâtiments à énergie positive. Sa réponse : une enveloppe pensée comme une peau qui enrobe le bâtiment et permet d’éviter les ponts thermiques, doublée d’un travail sur la notion de « mou » et de « dur » en architecture. Pour synthétiser sa position, Edouard François explique :

« Entre deux solutions, je choisis la plus économique et celle qui a le plus d’usage, cela se fait finalement indépendamment de la beauté qui m’intéresse assez peu. ».
2011-05-31
La maison écolo «clé en main »

Que ce soit Saint-Gobain et sa « maison Multi-Confort » (basse consommation et à énergie positive) de l'architecte Laure Levanneur ou EDF Bleu Ciel qui souhaite s'engager dans la valorisation de ce type de projets au travers des ses Trophées, de plus en plus de marques se positionnent pour proposer une maison écolo «clé en main » ou presque.

C'est notamment le cas des villas concept qui viennent de présenter à la presse leur vitrine, le bateau Ivre. Le point sur les forces et les faiblesses de ce projet.

Le Bateau Ivre  

Imaginée par l’architecte Jacques Patingre pour un couple avec trois enfants, le « Bateau Ivre » propose des performances énergétiques de 38 KW/h/m² an, soit moins que les exigences de la future RT 2012 (50 KW/h/m²). Construite dans le Vaucluse (84), c’est le premier bâtiment à bénéficier d’un cahier des charges “Villasconcept.com”, nouvelle marque de maison « contemporaine à hautes performances énergétiques » lancée par le constructeur Villas La Provençale. Une réalisation qui a reçu pas moins de six récompenses.

Ses principales caractéristiques ? Des panneaux solaires (en prévision) qui devraient assurer 80% de la consommation d'eau chaude sanitaire, une isolation thermique performante, un système de récupération des eaux de pluie et une volonté d'offrir de grands volumes, le tout dans une architecture contemporaine. «  Il s'agit d'une alternative à la maison traditionnelle, dans les mêmes fourchettes de prix », explique Jacques Patingre, architecte du projet et directeur associé de Villasconcept.com. Le constructeur propose ainsi plusieurs gammes de maisons « allant de 150.000 à 250.000 euros pour un maximum de 2400euros du m² ». Le coût de la maison le Bateau Ivre se chiffre ainsi à environ 500.000 euros. Tout de même.  

Limites du projet

Outre son coût assez prohibitif, cette réalisation n'est pas transposable sur tout le territoire. « On construit environ 250 maisons par an dans le Sud-Est de la France et on souhaiterait que cette gamme représente de 20 à 30% de notre offre», précise Jacques Patingre. De sorte que la possibilité de dupliquer ce modèle de maisons est finalement assez faible : «  Nous ne pourrions pas proposer exactement la même chose dans le Nord de la France, ajoute-t-il. C'est un modèle qui convient dans une zone climatique favorable où l'ensoleillement est important et les températures douces. »

De plus, il s'agit d'un projet de maison individuelle située dans un quartier pavillonnaire très peu équipé en transports en commun... ce qui implique forcément des déplacements en voiture et donc une mobilité à forte consommation de CO2. A l’heure où la préservation de l’environnement concourt à l’essor des maisons basse consommation, on est en droit de se demander dans quelle mesure la question de l'habitat durable ne se situe pas a minima à l'échelle du quartier ?

2011-05-12